Le parcours diagnostic côté pratique

 

Selon l’âge auquel le diagnostic est fait et parce que c’est un spectre, chaque parcours est unique.

Idéalement, le diagnostic devra être fait par une équipe pluridisciplinaire. Le parcours comprendra :

– un état des antécédents familiaux et médicaux (anamnèse),

– un bilan neuropsychologique,

– un bilan de santé général,

– la recherche des signes physiques éventuels du SAF et au besoin, des examens des organes internes (risques de malformations en cas de SAF)

– et un examen génétique.

 

 

 

 

Les traits faciaux caractéristiques : présents seulement dans les cas de SAF

Le Syndrome d’Alcoolisation Fœtale se caractérise par un retard de croissance intra-utérin, un petit périmètre crânien et des traits faciaux caractéristiques, visibles dans l’enfance, moins à l’âge adulte. Le médecin recherchera la présence simultanée de trois d’entre eux qui suffisent à distinguer une personne atteinte de SAF : les fentes palpébrales courtes, un philtrum plat et une lèvre supérieure amincie. Mais ces signes peuvent être absents, partiellement ou totalement, chez des personnes ayant connu une exposition prénatale à l’alcool. Le médecin s’appuiera alors sur l’évaluation neuropsychologique pour le diagnostic.

©Marion Audren

Evaluation neuropsychologique

 

Selon les personnes, le cerveau aura été impacté différemment sur les différentes fonctions. Pour la MDPH, (Maison Départementale des Personnes Handicapées) un diagnostic de TSAF est indispensable, mais pas suffisant… Il permettra de se préparer à certaines situations spécifiques, mais il faut surtout s’appuyer sur les résultats des tests neuropsychologiques. Associés aux observations de la famille, ils vont donner le bilan fonctionnel de la personne, c’est-à-dire l’image complète et précise de ses déficits et de ses forces afin de mettre en place des aides et des compensations.

Le bilan neuropsychologique n’est pas spécifique des TSAF, les tests sont les mêmes que pour tous les TND ou les maladies du vieillissement. Ils étudient dix domaines :

Il doit y avoir des déficits importants dans au moins trois domaines pour l’établissement d’un diagnostic de TSAF, avec des scores situés à deux écarts-types ou plus sous la moyenne.

Les neuropsychologues disposent de nombreux outils. Chaque évaluation est individualisée et les tests sont choisis par le professionnel en fonction du motif de consultation de la famille/patient, des éléments recueillis lors de l’anamnèse, des observations, et de l’âge du patient.

Un exemple de test (donné par Shanti Fontaine, neuropsychologue à la COREADD, Bordeaux) :

  • L’Échelle d’intelligence de Wechsler pour Adultes (WAIS-IV):

Il s’agit d’un test très utilisé par les professionnels lors des bilans. Il permet une première évaluation globale du fonctionnement cognitif chez les adultes (de 16 ans à 79 ans). La WAIS-IV est composée de 10 sous-tests principaux. La performance de la personne est résumée à l’aide des quatre indices suivants : l’indice de Compréhension Verbale, l’indice de Raisonnement Perceptif, l’indice de Mémoire de Travail et l’indice de Vitesse de Traitement. L’échelle globale fourni le quotient intellectuel (QI).

Des tests complémentaires peuvent ensuite être réalisés pour une évaluation plus approfondie et plus spécifique des différentes fonctions cognitives. 

Une fois tous les bilans faits et selon les résultats, le médecin (neuropédiatre pour les enfants) posera le diagnostic : SAF, SAF partiel, TSAF non syndromiques, … ou autre. Car il peut arriver que les bilans ne soient pas assez significatifs, que l’exposition à l’alcool ne puisse pas être confirmée ou que d’autres examens (génétiques par exemple) viennent compliquer le diagnostic ou l’orienter différemment.

Le dossier MDPH et les prises en charge

Si le diagnostic de SAF ou TSAF est posé et selon le compte-rendu du neuropsychologue, le médecin proposera d’ouvrir un dossier à la MDPH. Lorsque vous remplissez un tel dossier, il est conseillé d’expliquer le niveau d’atteinte pour chaque fonction (mentionné dans le bilan neuropsychologique), et surtout de détailler en quoi cela impacte la vie quotidienne, la scolarité, l’autonomie de la personne. La MDPH en déduira les compensations ou adaptations nécessaires. Plus vous serez précis et factuels, mieux ce sera.

Certains enfants iront en classe spécialisée avec plus de prises en charge, comme les ULIS, IME, ITEP, qui permettent des prises en charge multiples, des petits effectifs. D’autres resteront dans le système classique, avec beaucoup d’efforts et avec des aménagements selon les besoins identifiés (ordinateur, tiers-temps aux examens, AESH, adaptations Dys…) et des prises en charge à l’extérieur, orthophonistes, orthoptistes, psychomotricien, ergothérapeutes, …, dans le privé ou le public, en plus du suivi par le psychiatre ou neuropédiatre.

Pourquoi poser un diagnostic de TSAF, parfois stigmatisant, et difficile pour les parents, si finalement, fonctionnellement, c’est un « cumul de TND » ?

Tout d’abord, savoir la cause permet de prévenir les risques d’addictions et de vulnérabilité sociale, qui sont plus que le cumul des comorbidités. Souvent, contrairement à ce que redoutent certains professionnels ou membres de la famille, savoir la cause des difficultés peut rapprocher la famille. Les parents et enfants ont accumulé des soupçons que la cause était psychologique ou éducative, alors qu’elle était neurologique. Même si l’enfant est suivi pour sa dyslexie, son TDAH, il faut une prise en charge pour les autres atteintes, vérifier qu’il n’y ait pas de malformations ailleurs également. Le spectre est large, les profils différents. Ceux qui n’ont que le handicap invisible ont été incompris pendant longtemps.

Rappelez-vous: les facteurs de protection contre les sur-handicaps les plus efficaces sont un environnement stable, aimant et une prise en charge précoce et adaptée. Donc fuyez les prises en charge qui remettent en question le lien au sein de la famille, qui discrédite votre éducation sans raison ! L’accompagnement psychologique, s’il s’avère nécessaire un moment, devra au contraire contribuer à la qualité du lien du jeune concerné et sa famille, pas à les culpabiliser.

Et néanmoins, quel que soit le niveau de QI, la capacité de mémoire, de langage, de motricité, de gestion des émotions, des troubles exécutifs… et contrairement aux autres TND, ils auront tous besoin de protection face à leur dys-maturité. (à suivre)